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Allons voir ! Noce de campagne

Du 2 juillet au 18 septembre 2022 Accueil grange pyramidale de Vailly sur Sauldre
Allons voir ! Noce de campagne

Karine Bonneval, avec la collaboration de Charlotte Poulsen / Delphine Ciavaldini / Léa Devenelle / Claude Pasquer / Paul Ricci / Marjolaine Turpin / Vladimir Skoda

Commissariat  : Sophie Auger Grappin

Pour cette 4ème édition, allons voir ! propose à des artistes, sélectionnés par Sophie Auger Grappin, d’intervenir dans et autour de différents sites ruraux, fermes, moulins, granges (notamment les granges pyramidales du XVIème siècle emblématiques de cette région), ou encore silos ou lavoirs, dans diverses communes du Pays Fort : Assigny, Barlieu, Concressault, Vailly-sur-Sauldre, Le Noyer. Ce circuit artistique permet de découvrir ou redécouvrir cette microrégion
agricole sous un nouveau jour.

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Noce de campagne, par Sophie Auger-Grappin

Sur les doux valons de la campagne du Pays fort, souvent situés au sein d’un hameau entouré de bosquets, non loin du clapotis d’une rivière se dressent des bâtiments séculaires qui portent la
mémoire collective de l’histoire paysanne. Les Granges pyramidales ont ceci de mystérieux et de fascinant qu’elles ont été des lieux de forte signification sociale. Souvent partagées par plusieurs
familles qui battaient ensemble le grain et logeaient leur bétail, elles s’y rassemblaient à la Saint-Jean ou le temps d’un banquet de mariage pour jouer de la musique, chanter, danser, partager
les moments forts d’une vie populaire autarcique. Non loin de ces hauts lieux de mémoire orale, les lavoirs constituaient aussi des espaces de rencontre animés et bruyants, presque festifs, où se retrouvaient régulièrement les habitantes entourées de leurs enfants en bas âge autour de la corvée de linge.
Si ces espaces étaient régis par un travail communautaire souvent collectif, ils étaient tout autant importants pour les relations sociales qui s’y jouaient, pour les temps de célébration qui s’y déroulaient où s’échangeaient des paroles et des gestes, des savoirs, non conscients ou
« insus ». Noce de Campagne, emprunte son nom à la chanson écrite en 1964 par Marie Laforêt décrivant avec émotion le souvenir tendre de la célébration d’un mariage paysan traversant gaiement la campagne suivi d’enfants. Elle est alors le témoin ému d’un monde en profonde mutation, transformé par la révolution industrielle, la motorisation et les remembrements de l’époque moderne.
Traversant des lieux paysans et agricoles de différentes époques jusqu’à aujourd’hui, le nouveau parcours d’Allons-voir propose d’arpenter cette campagne au gré des sculptures et installations
artistiques révélant par l’appropriation d’une histoire, d’un geste ou d’une pratique, un pan de ce patrimoine oral et populaire oublié.
Ainsi l’artiste Delphine Ciavaldini touchée par l’intérieur intimiste de la Grange du Joliveau a choisi d’y déployer une oeuvre composée de végétaux séchés tels que le foin, le chanvre et la ficelle tressés et cousus pour échafauder un double abri dans la grange. Une véritable architecture végétale hirsute laissant planer l’idée qu’elle a pu être le théâtre de rassemblements évanouis.
Adepte des pratiques discrètes passant par la broderie, la culture du jardin, le dessin, le modelage, Marjolaine Turpin s’initie depuis peu à la réalisation de pièces en verre. Elle choisit les lavoirs du Noyer et de Concressault marqués par le labeur des lavandières recherchant la blancheur et la douceur des linges. Elle conçoit un ensemble de jardinières en verre suspendues ou flottantes à la surface de l’eau telles des jardins de mise en culture des plantes utilisées durant les buées. Humidifiées en permanence par des liens de cotons reliées au bassin, ces capsules inversent le processus en faisant du linge et de l’eau, des agents de culture de plantes saponaires.
Dans le hameau du Moulin Riche à Concressault, Karine Bonneval, en collaboration avec la
potière Charlotte Poulsen, présente une sculpture inédite de fontaines de jouvence en céramique permettant la dégustation de sève de bouleau. Partant de l’hypothèse selon laquelle les granges
pyramidales remontent au passage des vikings sur la Loire, Karine Bonneval développe une oeuvre à partir de l’arbre de bouleau que ce peuple a particulièrement exploité pour ses multiples vertus. L’oeuvre Berkanan constitue le premier volet d’une recherche plus largement consacrée à cette étude du bouleau menée en collaboration avec le scientifique Nicolas Visez du Lasire de Villeneuve d’Ascq. Dans la grange pyramidale de Vailly-sur-Sauldre, Karine Bonneval présente également une pièce de 2017 conçue elle aussi en collaboration avec Charlotte Poulsen. Ecouter la Terre nous donne une interprétation riche et complexe du sol sur lequel nous marchons. S’intéressant aux dialogues invisibles avec le vivant qui nous entoure, elle imagine différentes céramiques en forme de fungis dressés, modelés et sonorisés à partir des captations faites de
l’activité vivantes de la terre.
A Vailly-sur-Sauldre, c’est d’abord l’oeuvre sphérique de Vladimir Skoda qui fait face à la grange pyramidale. L’artiste tout d’abord initié à la forge, façonne depuis plus de 50 ans des sphères en métal poli mais aussi des formes réfléchissantes convexes et concaves, et d’autres en métal perforé prenant comme point d’entrée le mouvement du regardeur et de son environnement comme élément de métamorphose du monde et de connexion avec les astres. La grande pièce
sphérique extérieure fait face à la pyramide, comme les formes géométriques initiales d’un jeu de
construction à l’échelle du paysage.
Deux jeunes artistes diplômés de l’Ensa Bourges, rejoignent l’édition d’allons-voir ! cette année. Familière de la ruralité et des pratiques de la chasse, Léa Devenelle développe une oeuvre sculpturale et performative portant un regard parfois amusé et avant tout engagé sur la
relation ambivalente que l’homme entretient avec l’animal sauvage, plus communément identifié comme le gibier des campagnes.
Troublant les perceptions et l’appréhension qu’on ressent des espaces, Paul Ricci utilise le dessin et la technique du trompe l’oeil architectural pour perturber notre approche du patrimoine.
Enfin, sur le site récent des silos de Badineau à Barlieu, cette année verra la création d’une oeuvre polychrome monumentale et pérenne de l’oeuvre “Polyrythmie”, de Claude Pasquer dont
la réalisation sera inaugurée en septembre. L’artiste adepte d’une pensée picturale propre aux principes combinatoires de l’art concret a imaginé sur les cylindres des silos des séquences
chromatiques orchestrant la diffraction lumineuse des six couleurs de l’arc-en-ciel.

Appropriations d’histoires, d’images, de gestes, de rituels collectifs, mais aussi inventions de narrativités insoupçonnées, les artistes ne sont pas des « faiseurs d’objets ». Ils cherchent au contraire à se positionner du côté de l’activité créatrice de l’être humain dans l’idée d’échapper à la catégorisation, au conformisme et d’inventer une autre dimension esthétique du monde.

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Karine Bonneval